PLACE PUBLIQUE > Pourquoi l’usine de Rennes est-elle autant touchée par la crise ?

JEAN-MARIE DAILLAND > Nous sommes frappés par une crise économique mondiale. Face à cette nouvelle donne, nous rentrons dans une spirale d’accélération et de changement. Dans ce contexte, je tiens tout d’abord à rappeler que le site de Rennes a fait la démonstration de sa capacité d’adaptation et de prise de décision rapide. Mais il faut faire un peu d’histoire pour bien comprendre la situation actuelle. Le site a 50 ans et il a été construit, comme les usines automobiles de l’époque, avec un potentiel de production de 400 000 véhicules par an. C’est une « 400 000 » comme on dit dans notre jargon ! Vous noterez que toutes les usines terminales construites à partir des années 1990 sont des « 200 000 », comme Sevelnord à Valenciennes, par exemple. Il y a donc au sein du groupe PSA Peugeot Citroën, une dualité entre des usines à grande force de frappe, comme Rennes et Sochaux, et celles dont la capacité est de 200 000 véhicules/an. Alors que nos marchés se sont éloignés, nous avons une industrie automobile française surcapacitaire. Nous devons donc adapter ces capacités à nos besoins, et nous sommes dans une spirale infernale de perte de performance de nos unités si nous les laissons en l’état.

PLACE PUBLIQUE > C’est ce qui justifie le « compactage » du site de Rennes ?

JEAN-MARIE DAILLAND > Exactement. Avant la crise, PSA s’était déjà engagé dans ce processus sur le site d’Aulnay, en région parisienne, qui a été ramené à 200 000 véhicules/an. Clairement, à Rennes, la crise a agi comme un accélérateur, en raison du positionnement du site sur les véhicules de gamme moyenne supérieure et haut de gamme. Il ne faut pas oublier non plus que Rennes n’a jamais atteint sa capacité de production optimale. Le record historique a été de 340 000 véhicules en 2005. Parmi les six usines terminales de PSA, Rennes arrive en cinquième position par le volume avec 230 000 véhicules produits en 2008. Mais le site a des atouts majeurs : ses compétences dans les métiers de l’automobile (ferrage, emboutissage, peinture…), son climat social, sa culture qualité depuis le début des années 80.

PLACE PUBLIQUE > Comment se présente 2010 pour La Janais ?

JEAN-MARIE DAILLAND > Très clairement, 2010 sera une année de transition. Nous préparons un nouveau véhicule Peugeot. Nous resterons à deux équipes en 2010, et nous produirons entre 130 000 et 140 000 véhicules, après un plus bas historique de 121 000 voitures en 2009. Il faudra attendre 2011 pour monter à 270 000 voitures, avec la mise en place d’une troisième équipe.

PLACE PUBLIQUE > Vous connaissez particulièrement bien le site pour y avoir effectué l’essentiel de votre carrière. Est-ce un atout pour négocier cette mutation sans précédent, notamment avec les élus locaux ?

JEAN-MARIE DAILLAND >
C’est vrai que j’ai des relations d’extrême proximité avec les acteurs locaux. Tous les élus de la région sont conscients de la situation et sont mobilisés. Ils partagent le plan d’analyse, nous travaillons la main dans la main, dans la conciliation. L’État et l’ensemble des collectivités nous soutiennent. Je suis convaincu que c’est collectivement que nous aboutirons aux meilleures solutions en faveur de l’emploi et de la compétitivité du bassin automobile rennais. PSA à Rennes, c’est un film dont nous allons écrire la suite tous ensemble, même si le scénario a changé !

Jean-Marie Dailland est le directeur de l’usine PSA Peugeot Citroën de la Jamais. Cette interview a été recueillie par Xavier Debontride.