les plus défavorisés
Vous êtes demandeur d’un logement social, vos ressources sont très faibles et vous avez des difficultés à vous loger par vous-même. L’agence immobilière à vocation sociale agit pour vous. Depuis quinze ans elle mobilise des logements privés en demandant à leurs propriétaires de les louer moins cher en contrepartie d’une garantie contre les risques locatifs…
Dès 1983, le district avait noté que les populations en difficulté (revenus trop faibles, absence d’autonomie, précarité familiale, mauvaise santé) avaient du mal à accéder à un logement. Il adopte alors sa première Politique locale de l’habitat, démarche volontariste pour accueillir toutes les catégories de population sur son territoire. Le rééquilibrage de la programmation des logements sociaux entre la ville-centre et les communes périphériques était déjà d’actualité.
En 1991, la préparation de la convention Ville-Habitat met en évidence un risque d’exclusion grandissante des ménages modestes, notamment les jeunes et les familles. Le marché immobilier rennais est alors très dynamique et les loyers y sont parmi les plus chers de France. Les ménages modestes ne peuvent plus quitter facilement le parc HLM pour accéder à la propriété. Le délai d’attente s’allonge pour les demandeurs de logements sociaux. Les publics les plus en difficultés sont fragilisés par cette attente qui peut parfois avoir de graves conséquences sur leur emploi et leur équilibre familial.
En 1994, le district vote son programme local de l’habitat. Comme les HLM ne peuvent répondre seuls à l’ensemble des besoins, une sollicitation du parc privé s’avère nécessaire et le district favorise la création d’une société indépendante, professionnelle, pour que les bailleurs privés acceptent de loger des publics qui ne présentent pas toutes les garanties. L’Agence immobilière à vocation sociale – une idée née en Rhône-Alpes, à l’initiative d’associations locales – est créée. Au nombre d’une quarantaine aujourd’hui en France, elles gèrent dix mille logements. Dès la fin de sa première année, l’AIVS de Rennes dispose dans le district d’un portefeuille de 40 logements privés.
Aujourd’hui, elle en gère 500, que rien ne distingue des autres, la moitié dans le parc privé et la moitié en HLM. La plupart sont de petits logements, des studios ou des T1. Sept sur dix sont situés à Rennes, les autres dans les communes de la périphérie. La confiance avec les propriétaires s’est construite au fil des années.
Lorsque l’on sait l’importance d’un toit pour son insertion sociale et professionnelle ou tout simplement pour sa dignité d’être humain, on ne peut que se réjouir d’avoir connu depuis 1980, date de la création de la commission habitat du district, une grande continuité dans les objectifs et l’action politique de l’agglomération rennaise.
Le Droit au logement opposable, rapidement voté en 2009 sous la pression de la rue (loi Dalo), revendiqué depuis des années par le milieu associatif, est maintenant applicable, théoriquement, sur le territoire national. Dans l’agglomération rennaise, c’est l’esprit du droit au logement qui a sous-tendu toutes les initiatives politiques des 30 dernières années. Il ne faut donc pas s’étonner si la commission Dalo ne croule pas sous les dossiers en Ille-et-Vilaine !
Les missions de l’AIVS ont évolué au fil du temps mais le cœur de métier demeure : pour développer l’offre, elle doit convaincre les bailleurs privés de lui louer leurs logements. Elle les mettra temporairement à disposition de ménages ayant été reconnus prioritaires par la commission locale de l’habitat. L’AIVS gère ce bien en « bon père de famille » comme une agence immobilière classique
Mais ce qui diffère d’une gestion classique, c’est l’équilibre économique proposé au propriétaire privé : en échange d’un loyer inférieur de 30 % environ à celui du marché, il bénéficiera de la garantie des risques locatifs (impayés, vacance, dégradations). Le faible niveau de loyer permet de son côté à l’agence de loger des personnes à revenus très faibles, mais solvabilisées en grande partie par l’aide au logement. Si des problèmes interviennent pendant la location, une équipe compétente veille au grain (techniciens, conseillers sociaux). Les référents sociaux du département peuvent aussi intervenir ou tout autre organisme social pertinent (par exemple les services de tutelle). Lorsque leur tour arrive, les occupants accèdent au parc HLM et le logement est remis en attribution.
Les propriétaires se déclarent en majorité satisfaits. Pour preuve, le bouche à oreille permet maintenant à l’agence de capter les logements nécessaires. Quels avantages y trouvent les propriétaires ? La satisfaction de permettre à des personnes en difficultés de trouver un toit est certes une réalité chez beaucoup de bailleurs privés, mais les avantages objectifs d’une gestion locative sécurisée comptent également dans leur choix : sécurité et régularité des loyers (le loyer convenu est garanti pendant toute la durée de la location), assurance d’une remise en état en cas de dégradations par le locataire, tranquillité de gestion par un organisme qui s’occupe directement des relations avec les locataires et les syndics et qui peut résoudre les petits problèmes quotidiens. Enfin la souplesse du système est appréciable. Le propriétaire s’engage pour trois ans (la plupart du temps, il laisse son bien à l’AIVS pendant plusieurs années) mais s’il souhaite pour diverses raisons en reprendre la disposition, c’est possible dans des conditions plus souples qu’en cas de bail classique, grâce à la rotation des locataires et leur accès naturel au parc social. Tous ces avantages permettent à l’AIVS de négocier un rabais sur les loyers.
Cet équilibre gagnant-gagnant a permis à l’AIVS de loger, à des tarifs proches de ceux des HLM, des ménages très modestes, dans un contexte de marché du logement très tendu et très cher. Depuis 2008, les loyers ont augmenté moins rapidement et de nombreux propriétaires se portent volontaires
La constitution du portefeuille de logements privés est le premier objectif de l’équipe restreinte constituée en 1995, mais des collaborations avec les communes sont venues augmenter l’offre de logements mis à la disposition de l’AIVS.
La Ville de Rennes, notamment, lui apporte les logements de son parc privé en attente de réaffectation ou de démolition, et plusieurs communes des biens acquis ou préemptés. Par ailleurs l’AIVS développe ses services.
L’agence prospecte ainsi des biens immobiliers pour le compte des organismes HLM pour se doter d’un parc de logements adaptés à des situations ou des modes de vie particuliers (très grandes familles par exemple).
Elle assure depuis 1998 la gestion immobilière de trois résidences sociales à Rennes. Elle s’est dotée en 2005 de logements temporaires pour personnes handicapées à Rennes ainsi que de logements d’urgence dans les communes du sud de l’agglomération en 2007.
Enfin elle a été sollicitée par Rennes Métropole pour reprendre la gestion du Sociotel, un hôtel de 40 chambres, autrefois gérée par le CCAS de la Ville de Rennes. Cet hôtel conserve sa vocation première, héberger à moindre coût des personnes modestes séjournant à Rennes pour des motifs d’insertion ou de formation professionnelle.
L’équipe de l’AIVS s’est renforcée au fil des besoins de compétences diverses. Une dizaine de personnes aux compétences commerciales, techniques, gestionnaires, et sociales assurent aujourd’hui l’activité. Six personnes ont rejoint l’équipe depuis l’ouverture du Sociotel.
Certains diront : ce système doit coûter cher ! Pourquoi ne pas faire rentrer directement ces personnes en logement social ?
L’AIVS est effectivement financée principalement par des fonds publics (département, Rennes Métropole, région, caisse d’allocations familiales, État, selon les missions). Elle facture également des honoraires de gestion aux propriétaires et les locataires paient la partie du loyer excédant l’allocation logement. Ce dispositif de solidarité n’a pas vocation à perdurer… mais, le mal-logement constaté chaque année par la Fondation Abbé Pierre n’est pas en voie de disparition. Le prolongement des séjours en structure collective est plus coûteux que l’accès à un logement et lorsque l’on a à faire à une famille la question est encore plus cruciale : comment évaluer l’impact de la séparation ou de l’inconfort sur des enfants ? Mais l’accès direct au parc social des plus prioritaires aboutirait à décaler indéfiniment l’accès des demandeurs des catégories moyennes.
L’AIVS permet de répondre à l’urgence, sans désorganiser les dispositifs de droit commun, et 80 % de ses locataires accèdent au parc social dans un délai de 20 mois. Un beau succès, lorsque l’on compare Rennes avec d’autres villes.