La fabrique des photos
Gérard Fourel fait des photos. Au sens manuel du verbe faire, il les fabrique depuis l’instant (et l’instinct) du premier regard et la décision du déclic jusqu’au format final ! Ce qui définit au plus près les photos de Gérard Fourel, ce ne sont pas leurs identifiants, c’est son identité même. Car ce sont des autoportraits qu’il nous livre en photographiant à Fougères des chaussonniers de chez Martin, Prime ou Bertin, des laitiers de la laiterie Nazart ou des verriers de la cristallerie. Gérard Fourel a embauché tôt dans la vie ouvrière. À 14 ans dans les moteurs et ensuite dans le sillage des Fougerais en bleus ou en blouses, ceux qu’il nous montre, dont il connaît les nom et prénom, ses frères et ses sœurs, ses compagnons, ses camarades, ses collègues du bout des chaînes, dans les matins grisous ou le feu d’enfer du four. Gérard Fourel donne à voir cet envers du décor. Tellement loin désormais, qu’il est devenu domaine d’archives. Presque un devoir de mémoire ! La mondialisation, les délocalisations, les fonds de pension, tous ces mots en sion ont scié Fougères! Jean Guéhenno, le Fougerais, fut romancier comme Fourel est photographe. De petite extraction ! Ses photos sont un geste pour rendre les honneurs. Un usinage de la mémoire pour un portrait qui n’est pas que nostalgique.