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Dossier
#06
Rennes s’est embellie
et veut sa part
RÉSUMÉ > Si la première activité du touriste urbain est la flânerie, la promenade, la déambulation, Rennes offre ces qualités d’ambiances tour à tour intimistes, solennelles, vivantes, festives, innovantes… qui séduisent le visiteur. De 1985 à nos jours, la mise en tourisme du territoire s’est étoffée. L’Office de Tourisme y participe en accueillant l’an dernier plus de 190 000 visiteurs et en faisant flèche de tout bois pour promouvoir Rennes comme destination touristique, en Bretagne et à l’étranger.

     Lors d’un colloque international portant sur les mondes urbains du tourisme, Michel Lussault, alors président de l’Université Rabelais de Tours, caractérisait dès 2005 le tourisme urbain de « genre commun, qui organise et conditionne de plus en plus notre vie quotidienne, inventant de nouvelles pratiques touristiques portées par des groupes sociaux cherchant à se réapproprier l’essence du voyage ». En un mot, le tourisme urbain serait le fait d’un touriste qui ne veut plus être l’idiot du voyage. 

Une ville agréable à regarder « tenue et entretenue »

     Pour Rémy Knafou, la fréquentation touristique des villes repose sur deux ressorts, « la qualité d’un patrimoine bien mis en valeur et l’animation de la grande ville avec le champ des possibles qu’elle ouvre ». À Rennes, l’établissement d’un secteur sauvegardé de 35 hectares (approbation du plan de sauvegarde : 1985), l’obligation de ravaler les façades tous les dix ans (1981), la mise en place d’un secteur piétonnier (1978), la création de festivals – les Transmusicales (1978) internationalement reconnues, les Tombées de la Nuit (1980)… – l’éclairage de monuments ont participé depuis 30 ans, avec l’offre muséale, à cette mise en valeur de la ville.
     En 1994, survient l’incendie du Palais du Parlement de Bretagne. Il émeut la France entière et réveille chez les Rennais et les Bretons, une conscience de la qualité de ce joyau. Au caractère exceptionnel du lieu historique, architectural, pictural, s’ajoute une dimension supplémentaire, celle d’une restauration exemplaire, expression des métiers et des savoir-faire qui ont su se transmettre. Il s’agit là d’un rare exemple en France d’une cour d’appel ouverte quotidiennement à la visite. Une convention, signée entre cette dernière et l’office de tourisme, en définit les modalités. La médiatisation de l’incendie, de la réouverture du Palais en 2000, des « Dix ans après… », a participé considérablement à la promotion de la ville où, de ce fait, il convient de s’arrêter. 31 400 personnes suivent en 2002 une visite du Parlement, 52 151 en 2004.
     À l’héritage du passé et à sa restauration vient répondre la capacité de créer un patrimoine pour demain, valeur ajoutée à la Métropole d’aujourd’hui. Les Champs Libres, dessinés par Christian de Portzamparc, en liant trois entités – bibliothèque, Espace des sciences et musée de Bretagne – ancrent l’attractivité métropolitaine. La réouverture du musée des Beaux-Arts remarquablement mis en valeur, participe, aux côtés de l’Écomusée de la Bintinais, à l’offre muséale nécessaire à l’attractivité touristique. Et la qualité des jardins se prête à une découverte patrimoniale (le Thabor et Oberthür, dessinés par Bühler), paysagère, florale, botanique, scientifique…
     L’offre doit être effective, forte, diversifiée, pour déclencher la venue du visiteur, même si, analyses, études, évaluations recoupent la même information: la première et principale activité du touriste urbain est la déambulation, la flânerie, la promenade. Celle-ci suppose une qualité des espaces publics et des services proposés : « Les visiteurs sont en droit d’attendre un fini touristique urbain, des lieux tenus et entretenus, qui appellent une élévation des standards de qualité », affirme Rémi Knafou.

     L’agrandissement du secteur piétonnier, l’élargissement des trottoirs en coeur de ville, la révision en cours du secteur sauvegardé, la création d’un centre de congrès et de vie citoyenne (2014-2015) dans un lieu patrimonial par excellence – le couvent des Jacobins restauré – la mise en place des zones de rencontres, les modes doux de circulation intégrant le système de vélos à la carte que les touristes peuvent agrémenter d’un audio-guide, concourent à la mise en tourisme de la Métropole.
     L’attractivité touristique urbaine repose aussi sur une scénographie patrimoniale par la mise en lumière d’édifices (Bourges, Rouen, Le Mans, Nancy, Lyon…). Une première réalisation confiée à « Spectaculaires » sur l’Hôtel de Ville à Noël en atteste, dispositif qu’il serait souhaitable d’étendre et d’amplifier à la période estivale, afin, notamment, d’attirer la clientèle en villégiature sur la côte.
     Une coopération souhaitée par Rennes Métropole avec Saint-Malo et Nantes se met en place, afin de favoriser l’échange de clientèle et de sensibiliser individuels et groupes à une itinérance urbaine avec pour point d’orgue le Mont-Saint-Michel…

L’office de tourisme: une bonne entrée en matière

     L’office de tourisme de Rennes Métropole est une association du type loi 1901 qui compte 31 emplois en équivalent temps plein organisés en six pôles. Son territoire de compétence est la communauté d’agglomération. Présidé par Bernard Lefèvre, il a pour premier vice-président, Honoré Puil, vice-président de Rennes Métropole délégué à l’urbanisme commercial, à l’artisanat et au du tourisme.Une convention d’objectifs et de moyens signée avec Rennes Métropole en définit les grands axes stratégiques : développement du tourisme d’agrément et renforcement du tourisme d’affaires.
     L’office de tourisme occupe depuis 1998, rue Saint- Yves, une chapelle du 15e siècle restaurée, classée monument historique, qui s’ouvre désormais à l’ouest, rue Le Bouteiller, grâce à la réalisation d’un sas financé par Rennes Métropole. Il permet au visiteur d’appréhender le lieu dès le parvis, qui retrouve ainsi tout son sens. Une maison à pan de bois du 17e siècle participe au charme du site, complétée par une architecture contemporaine qui borde le bâti au sud. Dernier témoignage de l’ancien hôpital Saint-Yves, la chapelle aux fines sculptures ligériennes présente un Centre d’interprétation de l’architecture et du patrimoine qui évoque la ville et la métropole à partir des matériaux qui les composent.
     Outre la démarche qualité, initiée en 2007, qui a permis l’obtention de la certification Afnor, l’office de tourisme a décroché ses quatre étoiles en 2009. Il est le premier en Bretagne à obtenir cette distinction, puis la marque « Qualité Tourisme ».
     Le financement de Rennes Métropole a permis à l’office de se doter de moyens communs à d’autres villes du tourisme urbain, en développant à compter de 2006 un « service réceptif et des congrès » intégrant une centrale de réservation proposant différentes offres métropolitaines en matière d’hébergement, de visites et de produits packagés. Citypass, brochures pour groupes… complètent le dispositif que vient renforcer une campagne de communication financée par Rennes Métropole pour la cinquième année consécutive.

Un effort particulier pour l’édition

     L’extension à la Métropole du label Ville d’art et d’histoire, délivré par le ministère de la Culture en 2005, favorise le déploiement des activités, qu’il s’agisse de visites programmées dans les différentes communes ou de pédagogie du patrimoine en faveur des scolaires (11 338 enfants en 2009). Cette sensibilisation participe au développement du tourisme de proximité et à la connaissance de la qualité urbaine contemporaine à travers la publication des guides-promenades. Vingt et un guides vacataires apportent leur concours à ce dispositif.
     Les Éditions du patrimoine confèrent à Rennes une belle place dans leurs publications bretonnes (deux guides sur cinq), à travers Le parlement de Bretagne et Rennes Métropole d’art et d’histoire. La publication du guide « Cartoville » chez Gallimard, en français et en anglais (juin 2010), abonde le volet éditorial par la diversité des registres posés – shopping, restauration, hôtellerie, création – favorisant ainsi le plaisir de la déambulation. Les offices de tourismes doivent imaginer de nouvelles éditions urbaines: pour ce faire, la Conférence nationale permanente du tourisme urbain a passé commande à Stéphane Juguet, anthropologue urbain, d’une méthodologie déclinable par les Offices de tourisme qui le souhaitent afin de renouveler ce volet de la mise en tourisme de leur territoire.
     Enfin, le site Internet de l’office de Rennes, traduit en langues étrangères (2005), revisité (2009), intègre un parcours virtuel en 3D. L’office concourt à fédérer les acteurs locaux et à faire connaître leurs talents au travers des expositions temporaires accueillies (le design, la mode, le forum Adopter son patrimoine, les Arts du feu…). À ce titre, il porte un festival gourmand, qui, par l’émulation qu’il suscite, favorise la créativité du territoire et sensibilise le public à la qualité des produits proposés par les chefs, restaurateurs, crêpiers…

     Lieu de réflexion, d’innovation et d’expérimentation, la Conférence nationale permanente du tourisme urbain (CNPTU), soutenue par la sous-direction du Tourisme, rassemble une quarantaine de villes et de communautés d’agglomérations. Fondée en 1989 par Edmond. Hervé, assisté de Jean-Bernard Vighetti, elle est présidée aujourd’hui par Jean-Yves Chapuis, vice-président de Rennes Métropole. L’office de tourisme assure le secrétariat général et technique de cette fédération.
     Outre les séances plénières, la CNPTU s’attache dans trois commissions, « Développement durable et formation », « Promotion, marketing et centre de congrès », « Communication et nouvelles technologies », à approfondir ces champs par l’audition d’experts, le portage d’enquêtes et d’analyses… En mars 2009, elle a organisé à Rennes un colloque « Tourisme urbain, patrimoine et qualité urbaine en Europe », associant à la réflexion le réseau de l’Alliance de villes européennes de culture, dont Rennes Métropole fait partie. Le séminaire de mai 2010 à Metz s’est attaché, entre autres, à définir les bases du tourisme de demain en analysant les idées reçues, voies de garage et pistes prometteuses, la mise en tourisme du patrimoine matériel et immatériel au regard de la mondialisation, en évoquant de nouvelles alliances pour de nouvelles opportunités à l’ère des réseaux.
     L’Office, par ailleurs, adhère, sous l’égide d’Atout- France, au Club Tourisme en Ville qui facilite notre promotion internationale sur des marchés prioritaires, au Club Patrimoine et Culture, qui valorise la métropole à travers un édifice emblématique – le Parlement de Bretagne – aux côtés des grands sites et monuments français. Elle participe aux côtés de Rennes Métropole à France Congrès.
     Dans le cadre de l’animation du label « Rennes métropole d’art et d’histoire, l’office participe enfin aux travaux de l’Association Nationale (cf. le guide Gallimard: Les Patrimoines de France, 2009), et de l’Union Bretonne.

     Le tourisme urbain a vu émerger une nouvelle demande: le bref séjour dans la ville, le « city-break », favorisé par les RTT et les longs week-ends, avec ce qu’il sous-tend d’offres individualisées, à la carte, exigeantes, en réponse aux différentes catégories de visiteurs (souvent de moins de 35 ans et de plus de 49 ans). Ce « cousu main », packagé pour chacun, répond au désir d’autonomie, d’émotions partagées, d’histoires, qu’offre la ville parce qu’il s’y passe quelque chose. « La ville est notre espace et nous n’en avons pas d’autres », disait Georges Pérec.
     Le touriste d’affaires tient par nature une place importante en milieu urbain et se mesure plus facilement car il passe uniquement par un hébergement hôtelier, au contraire du touriste d’agrément qui peut avoir recours à la famille, aux amis, aux gîtes, au camping, etc.
     En 2009, le taux d’occupation des hôtels de la Métropole est de 58,3 %, soit 2,7 points de moins qu’en 2008 pour un nombre de nuitées de 965 783, dont 11 % de nuitées étrangères. Les meilleurs mois ayant été mars, juin et septembre3. L’auberge de jeunesse comptabilise 21 437 nuitées dont 30 % de nuitées étrangères, le camping des Gayeulles 20 860 nuitées dont 36,5 % de nuitées étrangères. Les nationalités les plus représentées sont respectivement les Anglais, Espagnols, Néerlandais puis Allemands.
    Le tourisme urbain est aussi un tourisme de proximité. La connaissance du territoire, la formation des différents prestataires, comme l’investissement des habitants, sont nécessaires. Parallèlement, l’originalité, la diversité, la qualité des prestations et équipements proposés peuvent participer à l’allongement du séjour si elles se révèlent suffisamment attractives.