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Dossier
#07
Ville désirée, ville durable, un projet
à partager
RÉSUMÉ > Trier ses déchets, économiser l’eau et l’énergie, marcher, faire du sport, rouler moins en voiture, manger des légumes… Aujourd’hui, on voit davantage les inconvénients et les contraintes du développement durable que ses avantages. Mais nous ne pourrons pas y échapper : nous sommes appelés à une révolution culturelle. Pour que la ville désirée soit durable, nous devrons la partager. C’est le thème et l’enjeu des rencontres des agences d’urbanisme qui se dérouleront à Rennes les 19, 20 et 21 octobre prochains.

     Chaque année, la rencontre nationale des agences d’urbanisme rassemble huit cents à mille congressistes issus du monde des agences et de leurs divers partenaires, notamment des collectivités, élus et techniciens. Après Nancy en 2009, la 31e Rencontre des agences d’urbanisme aura lieu à Rennes les 19, 20 et 21 octobre 2010. Elle aura pour thème la ville de demain. Cette ville devra être une « ville désirée » et satisfaire les aspirations des habitants. Elle devra aussi être une « ville durable » et répondre aux grands défis environnementaux, économiques et sociaux.

Une ville « durable » peu « désirée » ?

     Or, aujourd’hui, bon nombre d’enjeux du développement durable apparaissent pour les habitants plutôt comme des contraintes que comme des aspirations.
     Ainsi, on leur parle de ville compacte alors qu’ils recherchent désespérément un petit pavillon, de transports collectifs quand la voiture leur offre une liberté inégalable, d’une consommation raisonnée quand la publicité les tire vers le « toujours plus ! toujours nouveau ! ».
     Par ailleurs si on les fait rêver à un logement basse consommation ou à énergie positive, aujourd’hui leur coût est tel qu’ils sont presque toujours l’apanage des classes aisées, à l’exception de quelques opérations sociales. Il en est de même pour les « produits verts » ou « bio », délaissés par une grande part de la population, contrainte à la recherche du prix le plus bas.
     Le développement durable cherche à répondre aux besoins de tous et insiste sur la nécessaire solidarité au sein de la société, tant sociale que générationnelle ou entre les genres. Or le système de production privilégie la performance individuelle et sacralise la concurrence plutôt que la coopération. C’est ainsi que les inégalités continuent à se creuser, tant entre pays riches et pauvres, qu’au sein des sociétés développées où les laissés-pour-compte sont de plus en plus nombreux, malgré les transferts sociaux.

     Les défis sont donc considérables. La société et la ville de demain seront fondamentalement différentes de celles d’aujourd’hui. L’usage d’un bien sera de plus en plus dissocié de sa propriété. Le bien-être, mesuré aujourd’hui en termes de produit intérieur brut, ne pourra plus être réduit à la seule accumulation de biens et à leur renouvellement incessant.
     La prise en compte simultanée des intérêts et des contraintes conduira à une fabrique de la ville beaucoup plus intégrée, dépassant et déstabilisant les expertises sectorielles. Le partage, la mise en commun deviendront de plus en plus la règle sur une planète finie qu’il faut ménager. Chacun individuellement, mais aussi la société dans son ensemble, nous sommes donc appelés à une véritable révolution culturelle.

     Pour aller vers cette « ville désirée » qui soit à la fois une « ville durable », il faut s’appuyer sur l’enthousiasme de tous pour mettre la société en mouvement. Cela impose d’aller vers une « ville partagée » à la construction de laquelle chacun est appelé.
     Les « usagers » de la ville se réduisent de moins en moins à ses seuls habitants. Il faut y ajouter les acteurs économiques, sociaux, culturels, etc. Leurs intérêts peuvent être contradictoires et pourtant ils doivent tous se sentir bien dans la ville. Il faut donc la bâtir avec eux en réalisant « l’équilibre des intérêts » sans négliger ceux des générations futures.
     Cette ouverture aux habitants et usagers est d’autant plus nécessaire qu’ils sont responsables de la moitié des émissions polluantes. Or leur comportement ne changera que s’ils sont mobilisés en étant associés aux décisions.
     C’est bien là l’enjeu, pas seulement pour demain mais dès aujourd’hui. À partir des nombreuses expériences réalisées ça et là, une culture de la co-production de la ville où chacun se reconnaisse est à construire.

     Cette coproduction nécessite une démarche intégrée où les intérêts de chacun sont partagés dès le départ. Or, aujourd’hui, dans la fabrique de la ville, les visions sectorielles ont du mal à se rencontrer.
     Si les évolutions législatives, avec les schémas de cohérence territoriale (Scot) et les plans locaux d’urbanisme (PLU) communautaires, cherchent à promouvoir la construction de projets plus transversaux, de larges progrès sont encore à accomplir en France, notamment en nous inspirant de certains de nos voisins européens.

     Une ville à la fois désirée et durable représente donc un changement radical par rapport à la situation actuelle. Le chemin pour y parvenir est ardu.
     Il faut expérimenter, avancer, puis tirer des enseignements des progrès comme des erreurs dans une « démarche apprenante » et progressive.
     Cette capitalisation peut notamment s’appuyer sur le « cadre de référence de la Charte de Leipzig » que l’Europe est en train d’élaborer pour aider les acteurs à piloter et suivre les politiques et les projets qu’ils mènent pour promouvoir un développement plus durable.
     La 31e Rencontre des agences d’urbanisme s’attachera donc à voir comment la ville de demain peut être construite avec l’ensemble des acteurs et la population pour répondre aux besoins et aspirations de tous, tout en relevant les défis du développement durable.

     Informations complémentaires sur le programme et inscriptions : www.audiar.org