Prise en 1907, cette photographie témoigne du succès populaire de la Fête des Fleurs dont la première édition remonte à 1899. L’initiative en revient aux milieux économiques qui sont alors très présents dans le comité d’organisation et il n’est donc pas surprenant que cette prise de vue, peut-être fruit d’une commande, soit centrée sur le char de l’Union du Commerce et de l’Industrie. Organisée au mois de mai, la Fête des Fleurs s’inscrit dans une certaine émulation festive avec la fête de la Mi-Carême qui a lieu plus tôt dans l’année et qui s’avère plus juvénile et surtout estudiantine.
Un des grands moments de la Fête, qui dure deux jours, est constitué par le défilé des chars et véhicules fleuris qui, durant toute l’après-midi du dimanche 20 mai, traverse la ville en empruntant ses principales artères. Découpé en deux parties regroupant près de 125 chars, le défilé ajoute cette année-là à la partie fleurie, ici représentée par la photographie, une partie allégorique autour des thèmes de l’Hiver et de l’Été.
Le char de l’Union du commerce au premier plan, transportant des landaus fleuris que l’on devine difficilement, comporte dans sa partie arrière d’énormes bouquets de roses derrière lesquels on aperçoit le visage d’une jeune fille. Il est guidé par deux hommes en livrée sombre que précède un autre homme d’allure bourgeoise, en costume et haut de forme, sans doute un des dirigeants de l’Union du commerce.
Plus en arrière, suit un char plus massif représentant un navire dont on remarque la haute cheminée enguirlandée. En cette année 1907, la traction hippomobile est fort logiquement omniprésente même si le journal L’Ouest-Éclair, à cette occasion, se singularisa par l’utilisation d’une puissante automobile.
La foule, très nombreuse, est massée tout du long de l’avenue de la Gare (aujourd’hui avenue Janvier), décorée de fanions tricolores, que remontent les différents chars avant d’obliquer, en arrivant sur la place de la Gare, pour aller rejoindre le Champ de Mars où se dérouleront corso et velousel (parade cycliste) devant près de 20 000 personnes. De nombreux habitants du pays rennais sont du reste arrivés par la gare le jour même pour assister à ce point d’orgue d’une fête dont la renommée déborde sensiblement la ville.
On observe dans cette masse compacte d’hommes et de femmes la présence de très nombreux canotiers qui semble indiquer une chaleur presque estivale. L’importance de la foule nécessite certaines mesures de sécurité et l’on discerne à gauche, légèrement en avant des rangs denses des spectateurs, quelques gardiens de la paix.
Cette photographie, instantanée d’une après-midi festive dans la capitale bretonne, est reproduite sur carte postale dont la diffusion est à l’époque considérable. On note sur la droite, inscrit de haut en bas et partiellement masquée par le feuillage des arbres, la référence de la maison d’édition rennaise : Mary-Rousselière, un des gros éditeurs de la région.