Disons le tout net, le Musée des beaux-arts de Rennes ne brille pas spécialement au firmament de l’art contemporain. Tout occupé à bichonner derrière son austère façade ses célèbres collections du 17e siècle, notre musée aurait-il négligé le flux de l’actuel? Parfois, le « milieu » rennais de l’art loue l’époque bénie où le jeune Laurent Salomé dirigeait l’endroit, entre 1995 et 2001 , époque d’ouverture et d’acquisitions liées à l’art contemporain, notamment les œuvres de Geneviève Asse.
Si l’éclat ne semble plus au rendez-vous, il serait injuste de tout dénigrer. L’absence d’esbroufe est vertu rennaise. « C’est vrai que nous avons peu de grandes expositions, admet Laurence Imbernon, la conservatrice chargée de l’art contemporain. Mais nous menons un travail de fond et sommes très actifs en termes de partenariat et d’association avec les collègues de l’École des Beaux- Arts et des sections art de Rennes 2 ». Sans parler des liens amicaux créés avec le Triangle, le Frac et la Criée.
Et d’énumérer une série d’aventures artistiques auxquelles le Musée des beaux-arts a pris sa part avec enthousiasme depuis quelques années. Deux exemples : l’événement créé en 2006 avec l’artiste suisse John Armleder produisant de grandes peintures murales style papier peint enserrant les tableaux du musée. Ou encore en 2007, l’exposition de plaques gravées de Laurent Pariente en lien avec le Triangle.
La politique d’acquisition d’oeuvres récentes reste modeste. Malgré tout, l’association des Amis du musée présidée par Sylvie Blottière a permis l’achat cette année d’un dessin d’Aurélie Nemours. Il va rejoindre un fonds d’art moderne très estimable: « Nous possédons environ 800 estampes et dessins, explique Laurence Imbernon. En ce qui concerne les peintures et sculptures contemporaines, nous avons environ 500 oeuvres. »
Quatre-vingts pièces de cette collection sont exposées en permanence « dans un espace hélas un peu contraint, de 800 m2 ». Mais ils font la joie des visiteurs, sensibles à la cohérence didactique de l’ensemble: Magnelli, Gris, Kupka, de Staël, Tanguy, Laloy, Morellet, Hains, Villeglé… Trois femmes sont particulièrement représentées : Geneviève Asse, Aurélie Nemours et Véra Molnar.
« Cette collection ne vient pas de nulle part », rappelle la conservatrice. « Souvent, elle est issue d’artistes qui ont créé et enseigné dans cette ville de Rennes ». Parmi eux, Francis Pellerin qui fut pendant trente ans professeur à l’École des Beaux-Arts. Une de ses sculptures métalliques trône dans l’escalier central du patio. Pellerin fit partie du groupe Mesure, proche du mouvement de l’abstraction géométrique. En 1961, la première exposition du groupe eut lieu à Rennes. Y figurait à l’époque Georges Folmer (1895-1977), lequel Folmer, grand nom de l’abstraction géométrique, eut droit à une grande exposition de 160 de ses oeuvres dans ce même musée des Beaux Arts, tout récemment, en 2010.
Également professeur à Rennes, Adalberto Mecarelli. Cet artiste qui enseigna ici pendant vingt ans à l’École des Beaux arts est un maître de la lumière: il projette des éclairages et sculpte les formes avec ses rais. Son travail sera montré prochainement au musée. Autre projet, mais celui-ci pour 2013, une exposition sur le groupe GRAV (Groupe de Recherche d’Art Visuel) créé dans les années soixante et où s’illustre depuis le début le Choletais François Morellet, dont les oeuvres sont très présentes à Rennes.
D’ici là, le musée aura pris une part active à la Biennale de Rennes 2012 en accueillant des oeuvres dans son patio. Cette année 2012 devrait représenter un tournant pour la vieille institution rennaise. Francis Ribemont, le directeur, est parti en retraite. Laurence Imbernon assure l’interim en attendant le recrutement d’un nouveau conservateur en chef. Cette nouvelle donne permettra peut-être à l’art contemporain de trouver un nouveau souffle.