« Nous travaillons sur l’innovation numérique, au service de tous, en profitant des compétences exceptionnelles d’un territoire historiquement lié au développement des réseaux de communication et de l’image, avec une volonté de porter savoirs et solutions dans d’autres domaines, comme la santé par exemple aujourd’hui où l’habitat, demain », explique Bertrand Guilbaud, directeur général de l’Institut de recherche technologique (IRT) B-com. Depuis 2012, l’ex-dirigeant du pôle de compétitivité Images & Réseaux est à la tête du nouvel Institut qu’il a contribué à fonder. B-com s’intéresse à trois grands domaines d’activité : l’innovation hypermédia – les images ultra haute définition, le son spatialisé, les contenus intelligents et les réalités virtuelle et augmentée – et la recherche dans les domaines des réseaux ultra haut débit et de la e-santé, premier domaine d’application. La création de cette nouvelle structure est le fruit d’un appel à projets dans le cadre des Investissements d’avenir de l’État : une invitation à penser des modèles de recherche collaboratifs novateurs. « En 2012, nous avions une volonté stratégique de disposer d’infrastructures qui permettraient à nos chercheurs d’accélérer les projets que nous voulions lancer », rappelle Bertrand Guilbaud. Au regard de la surface recherchée de plus de 6 000 m2 et des délais de réalisation très courts, le choix se réduisait à quatre sites potentiels, dont trois sur Via Silva, la future écocité en cours de développement au nord-est de la métropole rennaise. « L’immeuble Le Mabilais, l’emblématique ancien siège de France télécom, était trop onéreux pour nous, nous avons retenu Via Silva », confie le directeur général.
Pierre Promotion et le Groupe Lamotte s’associent avec l’architecte Jean-Pierre Meignan pour répondre à une consultation ouverte. « Le jury nous a retenus et Territoires, l’aménageur, nous a vendu le foncier pour mener à bien très rapidement cette opération », confirme Sandra Blot, la gérante de Pierre Promotion, chef de file de la maîtrise d’ouvrage. « C’était pour nous une approche intéressante, avec un bâtiment tertiaire nouvelle génération où les bureaux traditionnels n’existent plus. La feuille était blanche, le cahier des charges restait à écrire, ce que nous avons fait au rythme d’une réunion hebdomadaire pendant un an. Dans un domaine de recherche où tout évolue très vite, il n’était pas rare de revenir sur un principe déjà acté. Sans la cohésion de notre groupe de travail, nous n’aurions pas pu mener à bien une telle opération », poursuit-elle.
Ce projet atypique a pris la forme d’un véritable challenge pour l’architecte Jean-Pierre Meignan : « L’ensemble de la maîtrise d’œuvre et d’ouvrage a tout fait pour que le projet soit livré en temps et en heure, avec des étapes de réflexion et de décision extrêmement courtes, demandant d’être réactif en permanence. Il fallait entendre à la fois les attentes de B-com et en même temps échanger avec le maître d’ouvrage pour que celles-ci s’inscrivent dans le projet chiffré…, explique l’architecte. Mais cela s’est très bien passé, car toutes les demandes ont été faites en cohérence avec le projet ». Un sentiment partagé par Bertrand Guilbaud : « Avoir pu mener un tel travail d’équipe avec tous les acteurs du territoire – Rennes Métropole, la Ville de Cesson-Sévigné, l’aménageur Territoires, les promoteurs, l’architecte et le conseil d’administration de B-com – pour donner forme à ce beau projet en dix-huit mois constitue un réel motif de fierté pour nous ».
En effet, si l’IRT est locataire du bâtiment, sa valeur d’usage est atypique. « Notre activité de recherche n’est pas figée et elle est amenée à évoluer, une incertitude qui demande aussi de pouvoir faire évoluer les fonctions en interne », note Bertrand Guilbaud. Ici, pas de bureaux mais des plateformes de travail avec un fil conducteur : la mixité des usages collaboratifs. « Cette conception correspond à notre philosophie : un travail de groupe en toute autonomie, qui demande aux équipes d’être proactives ». L’architecture est au service d’un travail d’équipe visant à renforcer la cohésion d’un groupe de salariés et de chercheurs mis à disposition. La terrasse de 300 m2 , les salles de sport et de musique contribuent à tisser des liens de proximité et des échanges informels conviviaux, moteur de cette dynamique managériale.
« Un sentiment d’appartenance » que ne démentira pas Stéphane Paquelet. Le manager du laboratoire Network Interfaces Lab, Interfaces Réseaux, constate : « Le campus est très accueillant et motivant pour nos collaborateurs. Le bâtiment véhicule les valeurs que nous portons dans un cadre d’intérêt général, à savoir transférer de la technologie vers les PME et les grands groupes. La mise à disposition d’un espace de conférence et d’un showroom l’illustre bien ». Avec une équipe d’une trentaine de collaborateurs, le laboratoire qu’il dirige développe un projet de recherche triennal, commencé en juin 2013, tourné vers les systèmes sans fil radio et les systèmes optiques. Face à l'explosion du trafic des données, l’avenir est à la collaboration accrue entre les systèmes de communication et le développement des modes de coopération : « Nous nous intéressons au système de 5e génération. L’enjeu est d’augmenter d’un facteur « mille » le débit de transmission ou bien de diviser par mille leur consommation énergétique ».
L’environnement de travail, souligne Stéphane Paquelet, contribue largement à stimuler la capacité de projet et d’intrapreneuriat. « Le bâtiment, par la mixité des activités sur cinq niveaux, favorise la rencontre et permet de faire émerger de nouveaux projets ». Par exemple, sur la même plateforme de travail se côtoient les experts en réseaux 5G, les chercheurs en imagerie médicale, des ergonomes spécialistes des interfaces et des développeurs de logiciels. « J’ai connu d’autres open spaces, mal agencés, sans intimité possible. Ici, il y a un effet de lumière avec une intimité préservée entre les différents espaces de travail », apprécie l’ingénieur.
Chacun peut choisir de travailler en groupe, de partager ou de s’isoler, en se retirant à l’intérieur d’espaces dédiés largement vitrés. Cette souplesse d’organisation souhaitée par les dirigeants de B-com offre une déclinaison d’espaces mutualisés et collaboratifs ou de repos et de créativité. « Ce système de boîtes transparentes placées de façon aléatoire organise les espaces pour un usage nomade suivant les projets à traiter, tout en créant des angles de vue et des perspectives différentes sur chacun des niveaux », commente Jean-Pierre Meignan, l’architecte. Dans l’ambiance des bureaux, pas de faux plafonds, souligne l’architecte, les réseaux techniques de connexion, de chauffage ou de ventilation sont apparents et bénéficient d’un traitement soigné. Le bâtiment est en effet ultra-connecté, une prestation annexe gérée directement par B-com et un bureau d’études spécialisé. La structure béton est volontairement restée brute, dotée de panneaux acoustiques qui deviennent des objets décoratifs.
Si la conception intérieure a été pensée pour ré- pondre aux besoins des utilisateurs, en revanche la structure béton du bâtiment ne pouvait être modifiée : « Je rêvais de poutres métalliques et d’un bâtiment en verre, en deuxième peau. J’adore New York avec les jeux de lumière au fil de la journée et de la nuit sur les bâtiments, miroirs de la vie de la cité », avoue Bertrand Guilbaud. Pour autant, l’architecte s’est montré très à l’écoute. « Il avait réalisé un autre bâtiment que j’aime beaucoup, le siège social de Biotrial sur Atalante-Villejean, à Rennes. C’est dans cet esprit que je souhaitais que nous travaillions. Lors de notre première rencontre, avec un simple crayon, il a esquissé ce qui est aujourd’hui l’image de B-com avec tous ces jeux possibles de lumière et de reflets, une façon de capter la vie de l’extérieur ».
Une image forte d’identification et de communication que Jean-Pierre Meignan affirme par un parti architectural qu’il expérimente volontiers pour les sièges sociaux d’entreprise qu’il conçoit. « Le jeu des façades n’est pas uniquement esthétique, c’est aussi un système de double façade thermique et acoustique, car nous sommes orientés ici sur le milieu “agressif” de la circulation automobile ». Une approche quasi sculpturale où les nouveaux matériaux d’isolation extérieure, en réponse à des performances énergétiques optimisées, sont sublimés pour apporter une signature originale. « Par ces reflets, j’ai voulu traduire l'activité du bâtiment : la recherche liée à l’image. J’ai dessiné des façades avec l’écriture graphique aléatoire des brises solaires. Une façade mouvante très animée grâce à des matériaux qui captent l’animation ambiante, comme un écran vidéo, en pleine visibilité sur le giratoire ». Cette écriture contemporaine voulue intemporelle par l’architecte, s’inscrit dans une nouvelle aire tertiaire et numérique qui questionne les codes traditionnels pour les décliner avec élégance.