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Contributions
#40
RÉSUMÉ > Notre rubrique de flânerie subjective se poursuit au fil des rues. L’œil exercé de Gilles Cervera capte des détails surprenants et poétiques au détour des rues, au ras du bitume ou au faîte des toitures. Psychothérapeute de profession, il analyse les dits et non-dits des murs et des villes, à travers ces clichés décalés et sensibles qui livrent à leur manière un singulier récit urbain.

     Dans ce chas d’aiguille, les enfants s’y faufilent, conquérants et joueurs, ou leurs parents. Le cèdre couché du Thabor a pas mal voyagé, de l’orangerie aux coulisses de l’Enfer. Trouvaille qui émerveille quand le sculpteur s’en empare. On pense au séquoia de notre livre de géo, à l’école primaire, quand la limousine américaine en traversait le tronc. Le Thabor est plus modeste. Les sculpteurs et les jardiniers raccords.

     Il y a, dans l’escalier des Catherinettes, ce trône. Doré, comme il se doit, à l’or fin de l’automne. Un trône où ne trône en cet instant personne, la nuit seulement. Des reines et des rois s’y assoient. Notons le ciment truqueur façon arbre, l’écorce armée de chaux et de fer, le trône est délicat et son coussin de feuilles. Le faux bois a ses raisons que l’automne ignore.

     L’œil a vu soudain éclore du nouveau. Un pignon de pinceau, une peinture murale et gigantesque dans les nouveaux horizons de Baud Chardonnet. À un bout, a Vilaine a son Vert Galant de résille et d’ouest, et maintenant à l’est, le fleuve se pare de palettes et le ciel est ravi.

      Saint-Malo, La Varde, Rothéneuf… Les promenades ont leurs promeneurs, processionnaires. Propriétaires ou non de chiens… Sauf que par moments, on lit de l’interdit. Et pire, interdits nous le sommes. Pour peu qu’on lise à deux fois le filigrane un peu déteint, attention, est-ce que j’y vais ? Fais-je le malin ? Hum, pourvu que ce soient les autres dont on parle sur le panneau !

     Plions les genoux. Rapetissons. Devenons petits à l’instar des enfants entre quatre et six ! Il est grand comme moi ce bonhomme aux yeux exorbités. C’est un robot, à coup sûr, il va me fondre dessus. D’ailleurs, il est rouge de colère. Dèche, la bouche d’incendie a des yeux globuleux et va me tomber sur le râble. N’empêche, beau me rassurer, il me regarde d’un drôle d’air.

     Fou de dieu. Dieu de fous. Des dingues se font exploser au beau milieu de nous. Un nous volatilisé que tout à coup ces fous réunissent, s’auto-désignant comme ennemis, nous instituant alliés ou amis. Les fous qui foudroient nous allient. Faut-il, pour retrouver le commun et les trois couleurs au beffroi, ce stoppage des fous ? Le fallait-il ? Il l’a fallu.

     Combien de ces petits minarets, clochetons, combien pour convoquer le sacré, faire la jonction entre le haut et le bas ? L’humain a inventé de ces trucs, architecturé de ces inventions, recouru à de ces structures, les maçons ont répondu à de ces commandes. Le vertige des forêts de pierres de Carnac est peut-être une origine ou les moaï de l’île de Pâques. Ce goût du sacré aurait pu demeurer intime, rester dans les consciences. Trop tard, l’espace public est hérissé de clochers, de tours, de flèches ou de fléchettes. Ici Acigné, par Arthur Régnault !