Marie-Jo et Claude Carret, comme leur nom l’indique, photographient au carré. On ne sait jamais de qui est leur regard, à qui attribuer telle image ni revient tel portrait. Peu importe ici l’ego, vécu à égalité, décuplé pour ceux qui à l’image s’offrent. Peut-être y-a-t-il dans ces quatre yeux qui regardent, tellement de présence que ceux qui s’y donnent s’y abandonnent vraiment. Les Carret, disons-le donc ainsi, sont aussi passés par la Socitété photographique rennaise. Ils sont d’ici et montrent le lointain. Pas l’exotique mais un lointain si proche, celui qui souvent est tellement proche et qui nous brûle, que d’aucuns voudraient refouler. Après les communautés laos ou mongs de Rennes, ils nous donnent à voir des Roms, des Gitans, des Tziganes de Roumanie, de Hongrie ou de cette Mitteleuropa qui est notre centre de gravité bien qu’on s’en défende.
Les Carret s’immergent là depuis 1984. Nomades à leur manière, roulant en combi, ils promènent leurs yeux, et ceux qui y vivent leur rendent leurs regards. Ou l’inverse. Les noirs et blanc sont des formats de toute manière à hauteur d’homme. Pas ici un vain mot : rom veut dire homme. Les enfants domestiquent des chevreaux, les hommes des motos. Les fagots virevoltent sur le chemin, les ray-bans nous fixent comme Jésus à sa croix et les femmes portent les échelles qui escaladent y compris le ciel.
Ces photos sont le contraire de clichés. Les Roms ne s’y trompent pas. Ni l’Alliance française qui, pour les Cinquante ans du jumelage de Rennes avec Brno en République Tchèque, expose le travail de Marie-Jo et Claude Carret. Dont ce portfolio ne montre qu’une partie. Le reste est à aller voir salle du Cloître de la mairie de Brno jusqu’au 31 mai 2015. Regardons au plus proche ou au plus loin, jusqu’au vaisseau de la benne avec pour hampe un haut-parleur. Une grappe d’enfants nous montre les chemins. Ceux d’une liberté trop souvent humiliée. Ceux de l’Europe car les Roms en sont.