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Dossier
#11
René Couanau, maire : Gare-République sera
le forum de Saint-Malo
RÉSUMÉ > En reculant la nouvelle gare de Saint-Malo, la ville a gagné des terrains dont elle avait besoin pour desservir le bâtiment, faciliter le passage des voyageurs d’un mode de transport à l’autre et augmenter son offre de logements. A égale distance de l’intra-muros, de Saint-Servan et de Paramé, le quartier Gare-République doit, selon le Maire, René Couanau, devenir le forum de Saint-Malo.

PLACE PUBLIQUE> Gare République : le seul nom du quartier témoigne d’un réaménagement bien plus large que celui d’un nouveau quartier de la gare. Quels sont les principaux axes de ce grand chantier ?

RENÉ COUANAU > Le projet Gare-République a émergé comme une évidence dès la décision d’électrification des voies SNCF entre Rennes et Saint-Malo. Reculer la gare de 270 m permettait de répondre à plusieurs problématiques urbaines qui nécessitaient toutes de dégager du foncier. Notamment, la création d’une nouvelle voie pour desservir le nouveau bâtiment voyageurs SNCF résout le problème récurrent de l’engorgement des boulevards des Talards et de la République, un des point de passage obligé entre le nord et le sud de l’agglomération. Le choix de reculer la gare permettait aussi de gommer la coupure urbaine engendrée par l’infrastructure ferroviaire, en créant un nouvel axe urbain entre les quartiers nord et sud de Saint-Malo. Par ailleurs, le plan local d’urbanisme approuvé en 2006 privilégie un développement maîtrisé de l’agglomération, en favorisant le renouvellement urbain au détriment de l’étalement de la ville, ce qui nous a conduits à rechercher des espaces de reconquête.

PLACE PUBLIQUE > Que souhaitiez-vous changer dans l’organisation de Saint Malo ? Les enjeux ont-ils évolué, ontils été redéfinis au cours du projet ?

RENÉ COUANAU >
Le remodelage d’un quartier tel que celui de la gare repose sur une vision d’ensemble tournée vers le Saint-Malo de 2020 et au-delà. En négociant avec la SNCF et Réseau Ferré de France la construction d’une nouvelle gare, à l’occasion de l’arrivée du TGV, la municipalité a fait le choix de «conquérir» un espace jusqu’ici occupé, en pleine ville, par les voies de chemin de fer, les deux bâtiments de l’ancienne gare et diverses installations. L’objectif de la ville de Saint-Malo est d’inscrire ce nouveau lieu dans un « réseau de centralités », en complément de celles qui existent déjà. A égale distance des trois coeurs historiques de Paramé, Saint-Servan et Saint- Malo, le futur quartier Gare-République fournira un espace public central à l’échelle de l’agglomération, autour duquel se construit un nouveau morceau de ville. L’axe historique avec la cité intra-muros et le port de commerce est donc renforcé avec une nouvelle gare à la dimension multimodale forte : en sus du TGV et des TER, un pôle de bus interurbain a été créé sur ses abords. Le réseau des transports en commun de l’agglomération a été repensé pour faire du pôle intermodal le point nodal du réseau. Par ailleurs, le projet laisse une large place aux modes de circulation doux, avec la création de pistes cyclables ainsi que des espaces publics piétonniers largement dimensionnés.

PLACE PUBLIQUE > Quelle place prennent en particulier le logement et les services dans cette opération ?

RENÉ COUANAU >
Le renouvellement du quartier de la Gare, Rocabey, entre dans un vaste programme de développement de l’offre de logements. Il s’agit de l’une des plus importantes opérations urbaines menées ces dernières années à Saint-Malo. Le projet porte sur la construction d’environ 360 logements. Il comprend également un hôtel de 80 chambres, des commerces en rez-de-chaussée des îlots ainsi que des bureaux et des services. Au centre de l’esplanade, la ville engage la construction d’un pôle culturel de grande envergure, composé d’une médiathèque et d’un cinéma Art et Essai.

PLACE PUBLIQUE > Quelles sont les caractéristiques de cette nouvelle gare, que peut-on y trouver de mieux ?

RENÉ COUANAU >
Le choix d’une nouvelle gare est la conséquence des lourds investissements menés dans le cadre du contrat de plan Etat – Région 2000-2006 pour l’électrification de la voie ferrée Rennes – Saint-Malo. Ces travaux permettaient au TGV d’arriver à Saint-Malo mais ils nécessitaient la refonte complète du plateau ferroviaire avec la création de nouveaux quais, le déplacement des aiguillages, la création d’une nouvelle signalisation… compatibles avec le format des TGV.

PLACE PUBLIQUE > Et le pôle intermodal ?

RENÉ COUANAU >
Le nouveau pôle intermodal, équipement à l’échelle de l’agglomération, répond à la volonté de rendre possibles des échanges entre les TGV et les TER, les bus urbains et interurbains, les taxis comme les véhicules particuliers et les modes doux (piétons et cyclistes) pour que les usagers vivent mieux le passage d’un mode de transport à un autre. Tout cela grâce à des équipements et des espaces publics multiples : la nouvelle gare SNCF, une gare routière pouvant recevoir dix bus interurbains, six arrêts de bus urbains sur la voirie au droit du parvis, une station de taxi, deux déposes-minutes pour les véhicules particuliers, des aires de stationnement de courte, moyenne et longue durée, un réseau de pistes cyclables et des stationnements aménagés pour les deuxroues, un parvis piétonnier composé d’une face ouest et nord offrant un accès sécurisé à l’ensemble des fonctions du pôle multimodal. La conception générale et la signalisation favorisent l’accès aux différentes composantes du pôle multimodal : toutes les fonctions sont visibles et accessibles depuis le parvis de la gare. Et pour les personnes à mobilité réduite, les cheminements seront identifiés et balisés.

PLACE PUBLIQUE > Par ailleurs, comment ce travail s’est-il passé et organisé, avec la SNCF ?

RENÉ COUANAU >
Dans le cadre de la loi d’orientation sur les transports intérieurs de 1983, le financement du nouveau bâtiment des voyageurs ainsi que la reconstitution de tous les équipements connexes (parking des voyageurs, guichets, locaux commerciaux, halle de fret…) ont été financés par la collectivité dans le cadre d’une convention avec la SNCF. Cet accord a été un préalable pour permettre la cession du foncier par la SNCF et par la RFF à la ville. Cette décision permet au Pays de Saint- Malo de disposer d’une gare moderne et accueillante, adaptée aux enjeux actuels du transport. La collaboration entre tous les acteurs, notamment entre la ville de Saint-Malo et la SNCF a été exemplaire. Elle a permis, en un temps très réduit et dans un site où se chevauchaient plusieurs chantiers importants, d’accueillir le TGV en décembre 2005, soit seulement cinq ans après les premières décisions, dans un nouveau bâtiment des voyageurs au sein du pôle intermodal. La livraison de l’ensemble des infrastructures est le résultat d’un partenariat constructif entre l’Etat, l’ensemble des collectivités locales et les entreprises publiques assurant l’infrastructure et le transport.

PLACE PUBLIQUE > On parle beaucoup de l’effet TGV, de l’effet LGV. Des frémissements se font-ils déjà sentir du côté des investisseurs, des marchés immobiliers ? Ne craignez- vous pas que Saint-Malo ne devienne une sorte de «ville secondaire» de la région parisienne ?

RENÉ COUANAU >
L’effet TGV s’est fait sentir dès 2005 ! La LGV déclenchera un autre effet sans doute de même ampleur. Mais on a tort de limiter notre regard à la seule région parisienne car les liaisons par TGV sont de plus en plus nombreuses avec les autres grandes villes françaises et européennes continentales. Le tourisme de court séjour, étalé sur toute l’année devrait être le premier bénéficiaire et ce sera bon pour l’emploi. Mesurons aussi l’importance de cette nouvelle respiration pour les entreprises déjà implantées dans la région, et la chance supplémentaire pour celles qui se créent. Le risque de surchauffe du secteur de l’immobilier est réel : nous devons poursuivre notre politique de mixité sociale en imposant un juste équilibre aux programmes immobilier à venir.

PLACE PUBLIQUE > Vous pensez aussi à une ligne de transport en commun en site propre ?

RENÉ COUANAU >
Un projet a été déposé. L’amélioration du réseau de transport en commun, à l’échelle de l’agglomération, est une nécessité. La ligne de Transport en commun en site propre (TCSP) partira du parking Paul- Féval, et desservira, avec régularité, confort et accessibilité, sur une voie réservée, les points névralgiques de l’agglomération : l’Intra-muros, la gare, l’hôpital, le quartier de la Découverte, les centres commerciaux et de loisirs et les parkings d’entrée. Les autres lignes de bus y seront raccordées. La gare verra son intermodalité renforcée, n’oublions pas que la ligne TER Rennes – Saint- Malo connaît la plus forte croissance de Bretagne.

PLACE PUBLIQUE > Les effets de tels projets se mesurent à long terme. Comment voyez-vous Saint-Malo dans vingt ou trente ans ?

RENÉ COUANAU >
Le nouveau quartier de la gare devrait marquer une nouvelle étape historique dans l’intégration des trois villes, Saint-Servan, Saint-Malo et Paramé. Il n’a pas vocation à se substituer aux trois centres qui conservent chacun leur personnalité avec une vie de quartier qui leur est propre, mais il doit devenir, par sa situation géographique, le noeud des échanges et le forum.