<
>
Contributions
#37
Un film pour partager
la pédagogie de l’architecture
RÉSUMÉ > Comment devient-on architecte ? Comment enseigne-t-on l’architecture aujourd’hui ? Ces questions, et beaucoup d’autres, Valentin Souchet, étudiant en quatrième année à l’école d’architecture de Rennes (ENSA Bretagne) et Nicolas Clairand, diplômé de la même école en 2013 et désormais architecte en agence à Bruxelles, se les posent depuis quelque temps déjà. Pour tenter d’y répondre, ils préparent le tournage d’un documentaire sur la formation au métier d’architecte, en s’appuyant sur de nombreux témoignages. Leur démarche à visée pédagogique s’adresse à un large public.

     Avec Nicolas Clairand, un ami de l’école d’architecture de Rennes (l’ENSA Bretagne) et désormais en agence à Bruxelles, nous partageons nos réflexions autour d’un documentaire et d’un livre sur les études en architecture. Telles qu’elles sont et telles que nous les imaginons à l’avenir. Tous deux traiteraient de la pédagogie de l’architecture. Comment devient-on architecte ? Comment enseigne-t-on l’architecture aujourd’hui ? Comment voulons-nous l’enseigner demain ? Quelle école voulons nous pour demain ? Quel rôle pour l’architecte dans une époque aux contours incertains ?

     Le projet peut se résumer ainsi : il s’agit là d’un documentaire itinérant, nomade, dans lequel un étudiant part à la rencontre d’enseignants, architectes, philosophes, urbanistes, historiens, étudiants et chercheurs, afin de construire un récit qui se situe à la croisée des regards et qui sera porteur d’une dimension critique. Dans cette optique, nous tenterons de mettre en perspective les études et le métier d’architecte, notamment en croisant les aspirations de jeunes qui disposent d’un œil neuf et s’autorisent à poser des questions de néophytes, et les propos des professionnels expérimentés qui apporteront la prise de recul nécessaire.

     Le documentaire apparaît comme une plate-forme de dialogue visant à remettre à plat la question du « devenir architecte aujourd’hui ». Nos caméras voyageront à travers la France pour s’arrêter le temps d’un entretien. Nous voulons mutualiser des visions pédagogiques, qu’elles soient convergentes ou divergentes, pour construire ce documentaire comme un projet d’architecture, avec ses paradoxes, ses connivences, ses aspirations, ses oppositions.

     De la politique au chantier, en passant par l’école. L’école, non pas comme plate-forme académico-conformiste produisant à la chaîne les « starchitectes » de demain, non, pas celle-ci ! Nous voulons parler de cette école qui n’existe pas encore, qui prend part à la cité, où les savoirs dispensés en amphithéâtre le lundi deviennent des savoir-faire dès le mardi sur le chantier, in situ. Une école dans laquelle les savoirs sont mis à l’épreuve de la réalité et l’expérimentation permise. Une école en mouvement, l’école comme laboratoire de l’action, une école pour devenir architecte ici et maintenant. Une école dont on sort avec l’envie d’en découdre, d’embrasser un métier. Une école qui aura fait naître une vocation, l’envie d’être architecte d’une certaine manière, une envie d’inventer sa profession si elle n’existe pas.  

     Le déclic a eu lieu à la fin du rapport d’études réalisé en fin de licence. Un bilan écrit sur trois années de formation. J’avais l’envie de faire écrire étudiants et enseignants dans un livret afin de laisser une trace des différentes façons que l’on peut avoir d’apprendre l’architecture à l’ENSA Bretagne. L’idée de passer par l’image est plus attractive et j’ai alors commencé à réfléchir à la forme « documentaire » en juillet 2014. Cela a commencé par un travail d’analyse. Un travail très intéressant qui va bien au-delà de ce que j’imaginais puisqu’il a abouti à l’écriture de ce récit d’un étudiant en architecture qui cherche des réponses sur l’avenir de son métier. C’est en ce sens que ce documentaire est si particulier pour moi. J’ai donc contacté des amis et enseignants qui ont montré rapidement leur intérêt. Voyant l’enthousiasme qu’ils manifestaient pour ce projet, j’ai décidé d’ouvrir la réflexion à une vision plus large en contactant des philosophes, urbanistes, architectes, enseignants d’ailleurs, qui ont eux aussi répondu positivement et rapidement. À ce moment-là, je me suis trouvé face à une Shiva qu’il faudrait faire parler afin qu’elle réponde aux questions que partagent bon nombre d’étudiants au sein des écoles d’architecture en France.  

     L’intérêt de faire ce film, l’utilité que nous lui souhaitons, c’est de pouvoir aborder un sujet qui fait débat depuis longtemps au sein des écoles d’architecture : comment apprendre à devenir architecte ? Les étudiants des écoles sont amenés à se poser des questions que la société ne se pose pas encore, il leur faut imaginer une vie de quartier, des relations entre les gens, des solutions pratiques, esthé- tiques, à travers l’acte de bâtir. Et la réalité est que dans de nombreuses écoles, beaucoup d’enseignements du projet d’architecture sont quelque peu déréalisés.

     Lorsque chacun des intervenants a accepté de participer au documentaire, je leur ai demandé de les rencontrer, afin de réaliser un travail d’immersion, d’imprégnation en amont. Avec Nicolas, nous avons ainsi pu rencontrer Patrick Bouchain, Chris Younès, André Lespagnol, Grégory Azar, et communiquer par mail et téléphone avec les autres intervenants en attendant de les rencontrer, à chaque fois dans les lieux où nous aimerions tourner, à savoir, les lieux où les intervenants se sentent à l’aise. Nous voulons qu’ils soient naturels, grâce à des lieux qui leur sont familiers. Et lorsque nous y retournerons pour le tournage, nous y aurons déjà passé un moment ensemble, ce qui est très important pour nous.

     À ce jour, nous précisons l’écriture et la formalisation du projet. Nous avons déjà reçu de très bons retours de la part de plusieurs institutions pour les financements, mais nous cherchons encore des fonds. Depuis mai dernier, Gilles Coudert, producteur chez a.p.r.e.s. Productions, nous aide à mener ce projet afin de pouvoir le diffuser le plus largement auprès du grand public. Tous les soutiens sont les bienvenus !