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Initiatives urbaines
#19
RÉSUMÉ > Du samedi 29 septembre au dimanche 7 octobre, Rennes Métropole organise Viva-cités sur l’esplanade de Charles-de-Gaulle et au Liberté. Au programme, des expositions, des débats, des conférences, des animations festives. Jean de Legge, explique ici le sens de cet événement métropolitain. Opération de communication ? Ou vrai moment de renouvellement de la démocratie locale ?

     La ville de Rennes a une tradition événementielle qui s’inscrit depuis de nombreuses années dans un souci de développer la cohésion sociale. Il est important que des événements permettent l’appropriation de l’espace public, organisent le mélange des groupes sociaux, proposent des temporalités communes qui construisent des références partagées et des appartenances collectives. 
     Tout au long de l’année les Rennais partagent fêtes de rue, rassemblements sportifs, festivals, spectacles et illuminations, mais la Ville se doit aussi de donner des rendez-vous à ses habitants pour parler projet et avenir. Ainsi y eut-il « Rennes au futur » en 1987, « Rennes Cité Vision » en 1999, « Envie de Ville » en 2005. Cette année le rendez-vous est devenu métropolitain et a été nommé Viva-cités pour témoigner que les trente-huit communes de Rennes Métropole font cité ensemble.
     Viva-cités s’inscrit dans cette tradition et cette ambition démocratique d’une projection commune dans les enjeux de demain. La crise écologique et énergétique d’une part, la crise économique d’autre part avec ses graves conséquences sociales, européennes, nationales et locales justifient plus que jamais la nécessité de débattre de Rennes Métropole demain, c’est-à-dire des valeurs communes, des projets et investissements nécessaires, des politiques publiques à développer.
     La réflexion sur Rennes Métropole demain a été initiée par les élus qui ont travaillé ensemble au projet communautaire et qui souhaitaient poursuivre son élaboration de façon publique, en tenant compte des représentations des habitants et de leurs souhaits d’avenir du territoire. Viva-cités propose aux habitants des trente-huit communes de la Métropole un temps commun de réflexion sur la réalité de leur territoire, ses atouts, son dynamisme, et les enjeux auxquels il faut répondre.
     Cet évènement, au Liberté et esplanade Charles-de- Gaulle, est tout à la fois un moment de parole et d’échanges sur les conditions de l’avenir, un temps d’information et de réflexion sur les projets et les politiques publiques à développer et un espace d’animation conviviale, festive et populaire témoignant de la vitalité du territoire, de ses capacités d’initiative et de création.

     Entre mai et juin, plus de quatre mille habitants ont répondu à des questionnaires en ligne ou par voie postale. Des centaines de contributions ont été recueillies sur le site participatif « causes communes ». Balades urbaines, débats, plateaux télé ont été organisés dans les communes, des « boîtes à sons » ont permis notamment aux jeunes et ados de laisser des messages.
     Viva-cités sera un moment de restitution de tous ces témoignages et de toutes ces paroles. Il s’agit de mettre en valeur ces participations, de les prendre au sérieux ; certaines parlent de solidarité, d’appétit d’avenir et de projets, d’autres de crainte, de précarité et de souffrance, certaines parlent de l’ordre des choses, d’autre de désir, toutes participent à cette pluralité de points de vue, d’expériences et d’ambitions qui provoque le débat politique. La parole est témoignage, théâtre, expression artistique, débats, conférences.
     Viva-cités s’ouvrira par une conférence de Jeremy Rifkin, auteur d’ouvrages célèbres (Le rêve européen, L’âge de l’accès, La fin du travail) traitant de « la troisième révolution industrielle » et se clôturera avec Eric Orsenna par « un éloge de l’optimisme ».
     Cette ouverture et cette clôture traduisent l’ambition de Viva-cités, de proposer une intelligence de la crise pour y répondre collectivement en renouvelant le débat politique, notamment parce qu’une part importante des réponses aux défis de la crise se trouve dans les politiques territoriales.

Un temps d’information sur les projets

     Parler de la ville et de ses projets nécessitent de prendre en compte la durée. La forme de Rennes, c’est son histoire. C’est pourquoi l’accueil du public au Liberté s’ouvre par un regard historique sur Rennes et l’agglomération. Le choix a été fait de se reporter cinquante ans et cent ans en arrière. Il s’agit de rappeler que les grands projets d’aujourd’hui n’ont rien à envier à ceux du passé et aux visions de l’avenir qui les soutenaient. Au début du 20e siècle, la création de l’avenue Janvier, la construction du Palais du commerce, la liaison nord-sud de la Vilaine sont des exemples de grands projets. À partir des années 60 ce seront la création de quartiers entiers avec Cleunay, la rue de Brest, le Blosne, Villejean, Maurepas, l’invention des campus de Villejean et de Beaulieu, etc.
     L’appartenance collective se construit sur des représentations partagées du passé et de l’avenir, lesquelles sont au coeur de la culture locale. Le passé fonde un principe d’héritage, c’est-à-dire la responsabilité politique d’une génération, face à ce qu’elle trouve et à ce qu’elle laissera.
     Cette introduction historique permettra aux visiteurs de mieux regarder l’exposition urbaine traitant de projets tels que le Couvent des Jacobins, EuroRennes, ViaSilva, la deuxième ligne de métro… Elle permettra de mieux comprendre les évolutions des représentations de l’avenir liées à la pression de la crise et aux défis environnementaux.
     Les habitants pourront échanger avec architectes, paysagistes, urbanistes, élus. Les changements de paradigme du développement urbain modifient les façons de faire la ville. La présence de Patrick Bouchain avec son projet d’université foraine, liant l’architecture à l’expérimentation sociale et artistique, celle d’Alain Renk, qui développe des méthodes d’urbanisme participatif, proposent une nouvelle place des habitants dans la production de la ville.
     Les débats s’engagent la fois à l’échelle des communes et de la Métropole : Le modèle de la ville-archipel est-il tenable face aux évolutions démographiques et aux coûts des transports, quelle qualité de vie dans des quartiers denses ? Quel habitat pour répondre aux évolutions sociales et nouveaux modes de vie ? Quels espaces publics et quelle place de la nature en ville ? Quelles localisation des activités, quelles centralités à organiser entre les communes, en fonction de quelles mobilités et de quels services ?…

     Viva-cités est aussi le lieu d’une programmation quotidienne d’actions portées par la vie associative ou les communes. On y parlera de la « Ville amie des aînés », de « gestes qui sauvent », de « Convergences Culturelles », d’accès à la culture, des vingt ans du Frij (Fonds rennais d’initiative jeunes), des vingtcinq ans de TV Rennes, du Plan Climat, des nouvelles pratiques de mobilité, de la ville la nuit, de l’université dans son territoire, de soutien à l’économie et des métiers de demain, de création d’entreprise et d’innovation. On parlera de la Novosphère et de la cantine numérique, de tourisme, de la carte Sortir et des dispositifs de solidarité à développer…
     Viva-cités est une tribune où se montrent les engagements essentiels à la vie du territoire et c’est un temps fort de la vie culturelle et festive de la Métropole : Pique-nique esplanade Charles-de-Gaulle, concerts quotidiens à l’étage du Liberté, improvisations théâtrales, conférences ludiques (par l’Atelier de psychanalyse urbaine), animations autour de la biodiversité (en lien avec l’Espace des Sciences), discussion sur les propriétés des plantes locales (avec des botanistes), projections de films et documentaires (sur les utopies urbaines, sur les énergies renouvelables, sur des expérimentations sociales), ateliers ludiques au village numérique, expressions de plasticiens, expositions de photographes… Face aux anxiétés que produisent les inconnus de l’avenir, Viva-cités voudrait donner à voir les valeurs, les initiatives, la convivialité du territoire.
     Vivacités sera critiqué, certains feront, comme à l’habitude, le procès d’une opération de communication. D’autres pointeront, sans doute à juste titre, les manques et les faiblesses de la manifestation. Cependant les crises écologiques, économiques et sociales nous obligent plus que jamais à repenser les façons de produire une société locale accueillante à tous et jouant tout son rôle de grande métropole dans les flux économiques, culturels et scientifiques de demain. Si les élus ont voulu Viva-cités, c’est parce qu’il s’agit en définitive de démocratie. Assurément si la politique est l’intérêt de l’avenir et sa mise en discussion, Vivacité est un moment de renouvellement de la démocratie locale.