L'éditorial

Parfois, la ville crève l’écran. Dans un imaginaire urbain souvent vertical, la ville avec un grand V aime à dévoiler ses atours architecturaux en cinémascope, jusqu’à voler la vedette aux acteurs eux-mêmes. Rennes ou Saint-Malo n’appartiennent évidemment pas à cette catégorie (bien que la cité corsaire soit plutôt cinégénique avec ses remparts et ses embruns). Cela ne veut pourtant pas dire qu’elles n’entretiennent pas un lien singulier avec le cinéma. À Rennes, on peut ainsi croiser des producteurs, des acteurs, des professionnels de l’animation numérique… ainsi que de nombreux passionnés du 7e art. Sans oublier des festivals ayant pignon sur rue depuis plusieurs années – comme Travelling qui déroulera sa 26e édition, direction Oslo, début février, ou le festival du film d’animation de Bruz, qui s’est tenu en décembre dernier. Ici, des sociétés de production ont fait le pari d’exister à deux heures de la capitale, en misant sur des talents locaux et une rigueur exigeante. Les trois genres cinématographiques y sont d’ailleurs bien représentés, avec une prime, sans doute, à l’animation et au documentaire, même si plusieurs longs-métrages de fiction ont récemment choisi la capitale bretonne pour décor. Et ce n’est certainement pas un hasard si fin décembre, Saint-Malo a misé sur l’univers fantastique de Tolkien, le père de la saga du Seigneur des anneaux et du Hobbit, pour servir de fil rouge aux festivités d’inauguration de son nouveau pôle culturel, La Grande Passerelle. Ce sont donc ces thématiques autour de l’image animée qui servent de scénario au dossier du 33e numéro de Place Publique. À travers des portraits, des reportages, des analyses et des interviews, nous sommes allés à la rencontre de ces amoureux du grand écran. Ils dessinent une facette bouillonnante et créative de la vie culturelle locale et font part de leurs rêves, mais aussi de leurs attentes. À cet égard, l’obtention, en novembre, de la très attendue labellisation « French tech » permettra peut-être d’accélérer certains projets dans le domaine des industries créatives numériques. Les professionnels locaux rêvent déjà de lieux de tournages mutualisés, de formations renforcées, de nouvelles salles d’Art et Essai, d’expérimentations transformant la ville en écran géant… Avec Vincent Marcatté, l’image non plus n’est jamais loin, surtout lorsqu’elle est numérique. Dans un long entretien, le président du pôle Images & Réseaux et de B-com revient sur les enjeux de la French Tech. Il détaille les projets en cours au sein de ses équipes, tout en partageant ses techniques de management et son regard sur la ville. Également au sommaire de ce premier numéro de l’année 2015, une enquête inédite sur le séjour en captivité à Rennes du philosophe Emmanuel Levinas, un décryptage des enjeux du passage en Métropole de l’agglomération rennaise, une réaction du directeur de l’Audiar à l’analyse sur la ville archipel publiée dans le précédent numéro. Car c’est bien la vocation de Place Publique que de susciter débats et réflexions. En prolongeant l’analyse d’un numéro à l’autre, la revue offre ainsi à ses lecteurs une réelle opportunité d’échanges. À l’occasion des cinq ans de l’édition rennaise, nous avons pu mesurer combien ceux qui nous connaissent apprécient la revue. Tout l’enjeu, en ce début d’année, consiste à fidéliser et développer notre lectorat. En 2015, nous souhaitons franchir le cap symbolique des 1 000 exemplaires vendus par numéro. Notre site Internet va prochainement faire peau neuve pour offrir à nos lecteurs un réel prolongement numérique de la version papier. Enfin, un samedi par mois, je vous donne rendez-vous dans la nouvelle émission « Chercheurs en ville » sur Canal B (94 MHz), en partenariat avec la Maison des sciences de l’homme en Bretagne (MSHB) et la wikiradio de l’UEB. Bonne lecture, bonne écoute, et très belle année à tous !