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Dossier
#17
À Maure-de-Bretagne, l’impression de ne plus exister…
RÉSUMÉ >  Xavier Gizard, de Campel, a longtemps été le secrétaire général de la Conférence des régions périphériques maritimes d’Europe. Aujourd’hui il préside une association pour l’emploi dans son canton de Maure-de-Bretagne.

(suite)

Il apporte ici son témoignage pour contribuer au débat sur « les métropoles déséquilibrent-elles la Bretagne ? ». Sa réponse est plutôt affirmative.
     « Je préside l’Association cantonale pour le développement des emplois et des services (ACDES) de Maure de Bretagne (8 000 habitants pour la Communauté de communes). 
     Nous avons pu fournir du travail à 90 personnes en insertion en 2011. Notre Point Accueil Emploi reçoit 250 personnes par an et nous organisons avec le soutien de la Région des formations qualifiantes.

     Le canton a vu sa population s’accroître de 27% au cours des 10 dernières années, population attirée par le coût supportable du logement. Ce rajeunissement de la population peut être une vraie chance. Durant la même période le nombre d’emplois a crude 8%. Parmi les actifs, 65% sont des migrants quotidiens vers Rennes Métropole. Les niveaux de formation et de qualification sont faibles. Le pourcentage de cadres est évidemment très inférieur à la moyenne départementale. Cette année, Pôle emploi nous a informés qu’il arrêtait ce qu’il appelle les formations «délocalisées» (c’est-à-dire en fait les formations localisées dans le canton !) pour des raisons d’«efficience budgétaire» !
Le risque est réel de voir ce territoire devenir une banlieuedortoir dont les difficultés ne pourront que s’accroître avec l’évolution du prix du carburant, en l’absence d’une organisation volontariste de modes de transport alternatifs. Les interrogations de Jean Ollivro sur l’équilibre de la Bretagne me paraissent donc tout à fait pertinentes. Pour éviter un scénario tendanciel par trop évident, il conviendrait de s’interroger sur le type de contrat territorial qui pourrait être passé entre la Métropole, le Département, la Région, d’une part, et les territoires du type de Maure-de- Bretagne de l’autre. Cela afin d’inventer une nouvelle étape du modèle polycentrique qui a fait la fierté et la réussite économique et sociale de la Bretagne.

L’École des crêpiers partie à Rennes

     Rien dans ce qu’a vécu notre territoire en 2011 n’indique qu’on en prenne le chemin :
– l’entreprise historique de Maure-de-Bretagne, la minoterie Celbert (la farine Francine), après avoir été rachetée par une coopérative agricole du centre de la France, a licencié une bonne partie de son personnel et délocalisé à Chartres l’unité de conditionnement de la farine, unité source de la valeur ajoutée de l’entreprise. Ainsi a-t-on vu une coopérative agricole organiser la désindustrialisation de ce canton rural à travers un fleuron de son industrie agroalimentaire. Sans sourciller l’État a approuvé le plan de licenciements.
– liée à cette entreprise Maure accueillait une École de Maîtres Crêpiers, fondée par l’entreprise Celbert, internationalement connue et qui constituait une des rares activités tertiaires à rayonnement extérieur. Elle se délocalise pour intégrer le pôle de l’alimentation du futur à Bruz : n’y avait-il pas d’autre façon plus «intelligente» d’intégrer cette école dans un réseau bénéficiant de l’image de Rennes Métropole ? Les différentes assemblées délibérantes qui ont contribué au financement de ce pôle se sont-elles seulement posées la question ?
À entendre récemment les responsables des Agences d’urbanisme de Rennes Métropole et de Nantes Métropole lors d’un débat à Redon, on a l’impression que le territoire où j’habite n’existe tout simplement pas : il est un « hinterland » entre deux espaces de modernité auquel il est, au mieux, demandé de faire preuve de patience jusqu’à ce que les étalements des deux métropoles l’absorbent. Ne peut-on attendre un peu plus d’imagination et d’intérêt bien compris ? »