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Dossier
#02
Rennes Atalante
a 25 ans : universités
et entreprises travaillent ensemble
RÉSUMÉ > Les mondes universitaire et économique sont en interaction forte et permanente au sein de la technopole Rennes Atalante qui vient de fêter ses vingt-cinq ans. Ces deux mondes sont en train de changer et de se rapprocher. Ils se « frottent » ensemble à des projets communs de formation ou de recherche et contribuent ensemble à la richesse commune du territoire.

     Rennes Atalante, technopole de Rennes et de Saint-Malo, vient de fêter son 25e anniversaire en cette année 2009, l’occasion à la fois de faire un bilan des activités menées et de la trajectoire poursuivie tout au long de ce quart de siècle et surtout de se projeter dans l’avenir pour le quart de siècle suivant ! Il semble évident que l’une des lignes de forces essentielles à analyser et à conforter est l’interaction nécessaire entre deux mondes aux logiques et finalités complémentaires, le monde académique de la recherche et de l’innovation et celui du monde économique dont le facteur de croissance d’avenir reconnu reste également résolument orienté vers l’innovation.

La base indispensable : un tissu universitaire riche et reconnu

     Le monde académique est présent de longue date sur le site rennais ; il est étendu et diversifié en thématiques et en nature d’institutions, par la présence des deux Universités Rennes 1 et Rennes 2, des organismes nationaux de recherche tels le CNRS, l’Inria, l’Inserm, l’Inra, le Cemagref, le BRGM tous présents à Rennes ce qui, pour un même site universitaire en région hors Ile-de-France, constitue une densité extrêmement forte d’acteurs, enfin les grandes écoles de formation supérieure telles que l’École supérieure d’électricité, l’Institut Telecom, Agrocampus, l’ENSCR (Ecole de chimie), l’Insa de Rennes, l’antenne de Bretagne de l’ENS-Cachan, l’ESC-Rennes, l’Ensai (École de la statistique) et bien d’autres encore qui contribuent à faire de cette métropole, une cité au visage jeune et tournée vers la société de la connaissance, tournée également vers le monde, de par ses nombreux échanges internationaux tant économiques et culturels qu’universitaires.

     Une des étapes heureuses dans ce parcours historique fut, en 1984, de s’inscrire dans une démarche politique, pionnière à l’époque, sous l’impulsion du maire de Rennes, Edmond Hervé, président du district de Rennes, en se portant candidat et en obtenant de l’État la création d’une Zirst (Zone pour l’innovation et les réalisations scientifiques et techniques) qui fut très rapidement rebaptisée du plus joli nom de « technopole », s’anglicisant facilement sous la forme de Techno-Park ou plus généralement de Science Park. Le concept initial, qui prévalait à cette création, reste une dimension stratégique de Rennes Atalante, celle d’associer systématiquement en son sein c’est-à-dire au sein de ses instances de gouvernance, de réflexion, d’action et de communication, et de manière trilatérale, trois grandes catégories d’acteurs : les acteurs du monde de la recherche publique, les centres de recherche et développement et les entreprises de technologies innovantes, les représentants de l’État et des collectivités territoriales associées au projet et au financement de la technopole.
     Ces trois piliers de l’édifice technopolitain ont à bâtir une stratégie de développement économique en commun. Est-ce aisé, tout en respectant leurs logiques propres et missions respectives ? Tel est l’enjeu du partenariat que nous élaborons depuis 25 ans et souhaitons continuer à conforter. Cette « mayonnaise » partenariale a clairement pris dès la phase initiale de ce projet par le biais d’une volonté politique et ambitieuse forte relayée par les acteurs universitaires et industriels. Elle se concrétise désormais en 2009 par cinq sites technopolitains (quatre à Rennes et un à Saint-Malo), plus de 240 adhérents (entreprises et laboratoires) et plus de 16 000 emplois directs, des thématiques de recherche-développement innovantes fortement visibles autour des technologies de l’information et de la communication, de la biologie-santé, de l’agronomie et de la mécanique-productique.

Le mot d’ordre : réagir au quotidien

     S’il est bien un univers où, naturellement, on se doit d’évoluer en permanence, c’est à n’en pas douter celui de la recherche et de l’enseignement supérieur. L’avancée des connaissances crée cette nécessité de mouvement et d’éternel questionnement intellectuel autour de nouveaux défis scientifiques à relever et de verrous technologiques à lever. Le renouvellement générationnel crée également ce besoin et il est essentiel que les acteurs universitaires au sens large, accompagnent voire anticipent cette dynamique.
     Le parallèle est assez aisé à établir dans le monde de l’entreprise, en particulier celle tournée vers l’innovation technologique et les nouveaux usages à inventer. Le monde extérieur, tant économique que sociologique, change tout autour de l’entreprise ; elle se doit de prendre en compte ces évolutions systématiquement et avec une dimension d’analyse et de réactivité fortes. Se projeter sur l’avenir, être en avance sur les réalisations et comportements futurs, prendre des risques intellectuels en la matière, telles sont des lignes de force et des sentiments communément partagés par les acteurs technopolitains de Rennes Atalante.
     Encore plus peut-être que dans d’autres secteurs culturels et économiques, pour ce qui est de la recherche et de l’innovation, tout ne peut s’inscrire dans une démarche programmatique figée à l’avance. Le rythme usuel par exemple des contrats quadriennaux universitaires qui permettent de proposer un plan d’actions de recherche, une carte de formations renouvelée tous les quatre ans, est bien sûr nécessaire mais cette offre se doit d’être repensée et amendée en mode réactif au quotidien. Se donner donc régulièrement une feuille de route, établir des jalons intermédiaires de progression et maintenir un regard critique sur la trajectoire effectuée ou proposée pour l’avenir, voici clairement une démarche commune que nous retrouvons tant parmi les acteurs académiques que chez les industriels de la technopole.

L’innovation, une idée vieille comme le monde

     « La nouveauté, c’est vieux comme le monde », disait Jacques Prévert. Nous pouvons aisément paraphraser cette citation à propos de l’innovation, du transfert et de la valorisation issus de découvertes intellectuelles. Sans remonter à l’Antiquité, la seule évocation de Léonard de Vinci atteste que ce grand chercheur et créateur, aux multiples compétences, innovait déjà, sans le savoir peut-être, dans un domaine que nous appellerions désormais « sciences pour l’ingénieur ». De la même manière, par ses travaux de laboratoire puis par ses applications à la santé humaine, Louis Pasteur innovait dans le secteur de la biologie-santé, tant sur le plan de ses découvertes fondamentales que dans sa pratique.
     Ces deux exemples historiques ne sont pas uniques mais illustrent historiquement des domaines scientifiques riches en transfert et valorisation de nos jours ; ils peuvent bien sûr être démultipliés à l’infini pour illustrer le processus de la découverte scientifique qui conduit, par un chemin parfois long et tortueux, à l’avancée de connaissances mais aussi à la réalisation d’innovations technologiques. Il n’est pas inutile de répéter pédagogiquement cela, à une époque où ont cours des théories créationnistes, où fleurissent des raisonnements ascientifiques et où apparait un rejet des technologies ou de leur compréhension même partielle.

Les mondes académique et industriel ne s’ignorent plus

     Il y a des idées reçues, politiques ou sociologiques, qui ont la vie dure. Affirmer actuellement, comme on l’entend malheureusement encore parfois, que ces deux mondes, académique et industriel, ne se connaissent pas, ne se « frottent » pas ensemble à des projets communs de formation ou de recherche, ne contribuent pas ensemble à la richesse commune d’un territoire, c’est volontairement ignorer la réalité. L’université possède assurément son rôle essentiel d’entretien et d’avancée des fondements de la connaissance. L’entreprise a, quant à elle, la nécessité de développer des réalisations technologiques, des prototypes et des produits qui assureront leur propre développement économique et celui du territoire. Ces rôles disjoints en apparence se recoupent dans la phase de transfert et de valorisation, mission essentielle et reconnue désormais dans les plans d’actions stratégiques des établissements d’enseignement supérieur et de recherche.
     Une multitude de guichets de financement, d’appels à projets, de mécanismes incitatifs et de cadres de collaboration existent désormais pour faire en sorte que des projets partenariaux naissent. Citons bien sûr les recherches doctorales menées en partenariat industriel tels les contrats Cifre, les projets financés par l’Agence nationale de la recherche (ANR) déposés par un consortium constitué bien souvent de manière mixte d’acteurs universitaires et industriels ; il en est de même de projets intégrés (« Integrated project ») financés par le programme-cadre européen de R&D.
     Les pôles de compétitivité mis en place récemment sur les différents territoires régionaux et y compris les quatre pôles en Région Bretagne (sur les thématiques Images et Réseaux, Mer, Agronomie-agroalimentaire, Voiture du futur) sont à considérer comme les « agences » thématiques impulsant de tels projets collaboratifs et innovants, rapprochant ces acteurs en développant les volets de prospective, de prospection, d’intégration et de monstration de nouveaux prototypes et usages. Enfin, à titre d’actualité récente, il est important d’évoquer la perspective de création de fondations universitaires qui établiront encore une autre passerelle entre le monde universitaire et le monde entrepreneurial, par des investissements et donations financières sur projets.
     Les acteurs académiques en lien direct avec des thématiques de recherche à coloration technologique sont bien sûr fortement sollicités pour de tels partenariats recherche-industrie mais les acteurs académiques des sciences humaines et sociales ne sont pas absents de ce contexte de collaboration. La nécessité d’études approfondies autour des comportements sociologiques, de l’ergonomie de nouveaux outils, de l’appropriation culturelle de nouvelles technologies, est désormais acquise. Il en est de même pour la production de contenus numériques dont l’innovation culturelle et pédagogique est une des conditions essentielles de l’innovation dans les arts numériques ou le e-learning. La place rennaise est, en ce sens, historiquement pionnière en de nombreux événements culturels innovants.

Entre recherche et innovation, une véritable continuité

     Le vieux débat différenciant voire opposant la recherche fondamentale à la recherche appliquée semble désormais révolu ; il est absolument admis qu’il y a « des » recherches et surtout des cycles de recherche conduisant, séquentiellement ou en parallèle, à faire avancer des connaissances fondamentales, à les confronter à la validation expérimentale, puis à les insérer dans un processus d’innovation technologique, pour se conclure par un test auprès d’utilisateurs ou celui de validation clinique. Pratiquement, cette séquence ne se déroule pas de la même manière pour toutes les disciplines universitaires ni linéairement quant à son déroulement ; des allers-retours sont fréquents ce qui explicite concrètement ce continuum de préoccupations, de réflexions et d’actions reliant recherche et innovation.
     Pour ne prendre que deux exemples à fort développement et enjeux actuels tant scientifiques qu’économiques, l’aller-retour continuel entre les fondements de la théorie de l’information et les réalisations technologiques informatiques est permanent dans le domaine des sciences et technologies de l’information et de la communication (Stic) ; Il en va de même entre la biologie fondamentale et la pharmacologie dans le domaine, en plein essor, des biotechnologies.

Les dix ans d’Emergys : 58 entreprises en activité, 470 emplois créés

     Les missions de la technopole Rennes Atalante sont multiples, de l’animation et la promotion du territoire et de ses acteurs à celle du développement des entreprises de technologies innovantes. Parmi celles-ci, à n’en pas douter, l’une des tâches les plus enthousiasmantes est celle qui porte sur l’incubation et la création de nouvelles « start-up » issues ou en lien avec les établissements d’enseignement supérieur et de recherche. L’incubateur régional Emergys qui s’appuie sur les sept technopoles en Bretagne et qui est coordonné par Rennes Atalante, créé dans le cadre de la loi sur l’innovation en 1999, vient de fêter ses 10 ans d’activité avec un beau bilan de 100 projets incubés ; certains parmi eux sont encore en incubation mais à ce jour, 73 entreprises de technologies innovantes ont été créées, dont 58 sont encore en activité et représentent globalement 470 emplois directs.
     Il y a un esprit constructif, inventif derrière cette démarche de création d’entreprises ce qui fait que l’accompagnement de ces projets est extrêmement passionnant et enrichissant ; il y a également la concrétisation explicite du lien entre les recherches de nature fondamentale et la construction d’une activité économique, source de richesses et d’emplois, par le transfert et la valorisation de connaissances et d’expertise issues de ces recherches. En aucune façon, cette démarche n’est un long fleuve tranquille mais elle mérite d’être connue, vécue et expliquée pédagogiquement auprès des jeunes scientifiques qui sortent du milieu universitaire à l’issue de leurs formations doctorales ou postdoctorales. Ceux-ci en effet viennent de réaliser un premier projet professionnel tourné vers l’innovation et à ce titre, possèdent bien souvent un bagage de compétences tout à fait valorisable au travers d’une telle création d’entreprise.
     L’appui apporté lors de ces phases de maturation de projets et premiers mois de démarrage de l’activité entrepreneuriale est stratégique. Les écueils à éviter ne s’avèrent pas être principalement de nature scientifique car bien souvent l’expertise en ce domaine est au rendez-vous et est consolidé par un lien maintenu avec la structure de recherche accompagnante ; ils sont plus de nature économique, par la nécessité de disposer d’une analyse et d’une vision claire du positionnement du projet sur le plan national voire international ; ils peuvent être également de nature managériale par la constitution d’une véritable équipe associant compétences scientifiques et technologiques mais aussi de gestion et de marketing.

Un schéma régional sur l’innovation

     L’État comme les collectivités régionales ont récemment remis à plat leur schéma d’organisation et d’impulsion des filières d’innovation : une stratégie nationale de recherche et d’innovation a récemment été élaborée par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche ; sur le plan régional, un schéma régional sur l’innovation (SRI-Bretagne) a été conçu. Dans les deux cas, le transfert et la valorisation de compétences et de connaissances issues de la recherche publique vers le monde économique est au cœur du dispositif, avec la nécessité de construire un continuum performant d’acteurs et de relais impulsant cette politique en faveur de l’innovation.
     L’un des éléments fragiles reste la phase essentielle de prospection des projets éligibles à une valorisation, celle des projets liés à une création d’entreprises, enfin celles de leurs porteurs scientifiques. Ce travail est de longue haleine et clairement à entretenir et à remettre régulièrement au premier plan. L’autre phase à conforter concerne la maturation des projets permettant de dépasser l’étape initiale et essentielle de preuve de concept pour celle de construction du projet entrepreneurial. Des fonds de maturation de tels projets sont en cours de constitution tant au plan régional qu’au sein des organismes de recherche ou de futures sociétés de valorisation issues des établissements d’enseignement supérieur.

     Rennes Atalante a développé et amplifié depuis 25 ans sa stratégie en faveur du développement économique du territoire par le biais de la synergie entre Universités et entreprises, la création d’entreprises de technologies innovantes et du renforcement du potentiel de R&D au sein des entreprises existantes.
     L’un des rôles et mission-clés de la technopole est la mise en place d’outils favorisant la constitution de réseaux d’acteurs telles les conférences « Matinales » réunissant mensuellement (plus de 200 éditions à ce jour) une centaine de participants, et associant bien souvent, comme intervenants sur une thématique scientifique ou technologique précise, un acteur académique, un partenaire industriel et un « end user ». Ces conférences se tiennent sur les sites universitaires, ouverts ainsi aux partenaires industriels. En symétrie, des visites d’entreprises sont parfois associées à ces conférences permettant au public académique de mieux appréhender le potentiel industriel du site.
     L’aide aux entreprises investissant dans la R&D, dans leur phase de création mais aussi dans leur phase de développement au-delà des cinq premières années, par une écoute et une disponibilité de chargés de mission est également primordiale. Un programme intitulé « Essor » financé par Rennes Métropole vise à cet objectif essentiel de conforter ce développement et d’anticiper d’éventuelles difficultés liées à une croissance ou une évolution nécessaire de l’entreprise.
     Enfin, une bonne connaissance du tissu académique par un lien direct avec les personnes et les structures en charge de la valorisation au sein même des établissements d’enseignement supérieur et de recherche permet d’assurer ce lien absolument nécessaire.
     L’innovation n’est pas un sujet nouveau. Elle est, par nature, en perpétuel renouvellement. Nous nous attachons, avec enthousiasme, à participer à cette évolution continue pour faire fructifier ce maillon essentiel de développement économique de nos territoires en plein cœur de la société de la connaissance.

Rennes Atalante fédère

  • 252 entreprises de technologie employant 16 120 salariés (+ 751 emplois nouveaux en 2008)
  • 12 centres de recherche publics
  • 39 établissements d’enseignement supérieur
  • Près de 60 000 étudiants
  • Plus de 4 000 chercheurs